Emily Dickinson : un film et un essai


Emily Dickinson a été mise à l’honneur, un peu avant l’été, par deux sorties : celle du très beau film de Terence Davies Emily Dickinson : A Quiet Passion ; et celle du passionnant livre de Susan Howe Mon Emily Dickinson dans une traduction d’Antoine Cazé (qui signe aussi une excellente postface, « Fusil ChargéE »). Ce qui est frappant, c’est à quel point ces deux œuvres inspirées d’Emily Dickinson, tout en étant autre chose que des poèmes (l’un est un film biographique, l’autre un essai) sont aussi très manifestement, chacun à sa manière, des poèmes – à quel point ils relèvent d’un mode de pensée poétique. Emily Dickinson, qui dans sa vie a fermé sa porte à tout ce qui n’était pas poésie, ne saurait être approchée autrement que par l’écriture poétique.


Un extrait de Mon Emily Dickinson. Susan Howe écrit ceci en 1985, date de la sortie américaine de son ouvrage :

« Identité et mémoire sont essentielles pour quiconque écrit de la poésie. Pour les femmes, ce champ-là est encore d’une virginité terrifiante. Comment, en choisissant des messages dans le code établi par d’autres afin de contribuer au thème universel du Langage, puis-je l’extraire ELLE d’une myriade de symboles et d’apparitions qui le désignent LUI. Emily Dickinson soulevait constamment cette question dans ses poèmes ».


Et voici, parmi beaucoup d’autres, un court poème d’Emily Dickinson (le poème 870) cité par Susan Howe et traduit par Antoine Cazé :

Trouver est l’acte un,
L’acte deux, la perte,
Le trois, l’expédition de
La « Toison d’Or »

Le quatre, pas de découverte –
Le cinq, pas d’Equipage –
Pour finir, pas de Toison d’Or –
Jason – imposteur – lui aussi.


Finding is the first Act,
The second, loss,
Third, Expedition for
The "Golden Fleece"

Fourth, no Discovery —
Fifth, no Crew —
Finally, no Golden Fleece —
Jason — sham — too.


Photo du film de Terence Davies, Emily Dickinson : A Quiet Passion

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