Guillaume Decourt : Le Cargo de Rébétika

Guillaume Decourt, suite.

Les éditions Lanskine, après Les Heures grecques en 2015, publient ce qui n’est pas vraiment une suite mais, disons, un prolongement thématique : Le Cargo de Rébétika. La fiction semble ici prendre le pas sur l’autofiction : on trouve des personnages improbables (acupuncteur agaçant, tenancier d’embarcadère et lion amateurs de corne de brume) dans des lieux improbables (Dune aux Outrages ou Fontaine aux Affins). Le récit, fantaisiste et énigmatique, nous montre un « je » occupé à deux choses : attendre l’arrivée d’un improbable cargo de bananes, hésiter entre Grupetta et Rébétika, ses deux amours. Pendant que les personnages secondaires vaquent à leurs insondables activités.

La vie s’écoule dans cette petite île, ce petit port, différemment de ce qu’on aurait voulu (mais que voulait-on vraiment ?). De même que les mots se déploient différemment de ce qu’on aurait pensé (mais pense-t-on comme il faut ?). Le lion par exemple, c’est « au milieu de la cage thoracique » qu’il se tient ; quand un « incendie de camisoles » se déclare, « nous battons le gardon à tous les coins de rue », et le dresseur souffle « pour éteindre les / queues-de-cheval ». Allez savoir ! allez maîtriser quoi que ce soit.
Autant partir, autant chanter.



Ce cargo de bananes
n’arrivera jamais du côté de chez moi,
c’est peine perdue d’attendre livraison de régimes.
Quand bien même arriveraient-elles, nous ne saurions qu’en faire,
elles ne seraient que bananes sans teint ;
bananes bonnes à bannir.
Ce cargo de bananes, dont on me parle
depuis l’enfance,
n’arrivera jamais du côté de chez moi.

Guillaume Decourt, Le Cargo de Rébétika, éditions Lanskine, 2017


Jean-Michel Basquiat (Portrait of Andy Warhol as a Banana)

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