« […] le poème
fomente, dans l’une de ses propriétés les plus constantes, l’acte de résistance
le plus irréductible à la neutralisation de la langue telle qu’elle s’opère
aujourd’hui : la métaphore. Là où la langue mutante obéit au principe
absolu de l’accélération par troncation, siglaison, parataxe et nominalisation,
la métaphore oppose le détour, donc le ralentissement qui seul autorise l’expansion
du sens et sa lecture. La métaphore est longue en bouche, pourrait-on dire. La métaphore
fait obstacle, retient le pas et exige qu’on demeure. C’est ainsi enfin qu’on
habite sa langue et qu’on y décèle les accès jusque-là ignorés à la réalité. La
langue mutante impose le droit chemin, elle clôt. La métaphore est un geste
libertaire, elle déclôt. »
Jean-Pierre Siméon, La Poésie sauvera
le monde, Le Passeur éditeur, 2015
J'émets une réserve : il
faudrait dire "le poème occidental". Je ne connais à peu près rien aux poèmes d’Asie,
mais le haïku japonais, au moins, semble fonctionner sur un autre principe que
la métaphore (comme l’analyse Roland Barthes ici).
Arnold Böcklin, L'Île des morts |
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