"Anticorps"



A nouveau je donne à lire l’un de mes poèmes, à l’occasion de la parution du dernier numéro de Phoenix, l'auguste revue marseillaise (n° 18, été 2015).
On peut lire dans ce numéro d'autres textes de la série « Répondre », dont est tiré celui-ci. Le poème qui suit a été inspiré par l’installation photographique « Anticorps » d'Antoine d'Agata, dont j’avais déjà parlé ici.



est-ce le corps qui est triste
ou les fleurs pâles des papiers peints
l’amour absent

et pire que triste :
tordu durci
un paysage d’hiver sans lumière
des larmes noires qui sèchent 
une pièce vide

dans les rues briquées des villes du nord
la guerre fait rage
tous les bidonvilles du sud se ressemblent
chambres lépreuses murs mitraillés
chambres fleuries prostituées
des messieurs en cravate s’appuient aux murs propres
des ouvriers font tourner les usines
les frontières restent fermées

rien n’empêche la vie
emprisonnement ni usure
des corps

corps pires que tristes :
livrés nus
à la brutalité qui hélas
n’empêche pas la beauté


Antoine D'Agata, "Anticorps" (détail)