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Yannis Ritsos, "Hypothèque"


Des personnes nous quittent, des êtres qui participaient à la joie du monde, des amis. Voici un poème de Yannis Ritsos lu récemment en hommage à une amie disparue. C’est le poème qui est gravé sur la tombe de Ritsos lui-même, dans l’extraordinaire village de Monemvasia.



Hypothèque

Il a dit : je crois en la poésie, en l’amour, en la mort,
C’est justement pourquoi je crois en l’immortalité. J’écris un vers,
j’écris le monde ; j’existe ; le monde existe.
Du bout de mon petit doigt coule une rivière.
Le ciel est sept fois bleu. Cette pureté
est encore la première vérité, ma dernière volonté.

Samos, 31.03.69


ΥΠΟΘΗΚΗ

Είπε: Πιστεύω στην ποίηση, στον έρωτα, στο θάνατο,
γι’ αυτό ακριβώς πιστεύω στην αθανασία. Γράφω ένα στίχο,
γράφω τον κόσμο˙ υπάρχω˙ υπάρχει ο κόσμος.
Από την άκρη του μικρού δαχτύλου μου ρέει ένα ποτάμι.
Ο ουρανός είναι εφτά φορές γαλάζιος. Τούτη η καθαρότητα
είναι και πάλι η πρώτη αλήθεια, η τελευταία μου θέληση.
                                                                                 
                                               31.IIΙ.69

Yannis Ritsos, Pierres, Répétitions, Grilles, traduit du grec par Pascal Neveu

La tombe de Yannis Ritsos (photo Murièle Camac)

Un film, un poète : "Comme des lions de pierre..."


Une occasion d’entendre les magnifiques poèmes de Yannis Ristsos, écrits pendant sa déportation sur l’île de Makronissos en tant que détenu politique, en 1949-1950 : c’est le documentaire poétique de Olivier Zuchuat, Comme des lions de pierre à l’entrée de la nuit, qui vient de sortir.

Les textes sont remarquablement dits (en grec) par divers lecteurs – et remarquablement traduits en français par Pascal Neveu. Les images d’archives, ainsi que celles, filmées aujourd’hui, de l’île désertée, disent en écho le vent, les pierres, la dureté, la vie et la mort, l’oubli et le souvenir.



18 mai

Nous, ils nous ont abandonnés avec nos blessures.
Les soldats sortent pour la corvée
pieds nus et tondus dans des vareuses déchirées
nous les voyons de loin couper des brindilles
là-haut sur la montagne – comme s’ils nous aimaient.

Quand le soir tombe
ils descendent un peu avant le couvre-feu
ils urinent par groupe dans la mer
en regardant les lumières de Lavrion. Ils ne parlent pas.

Ils attendent quelque chose. Nous attendons quelque chose.
Toute la nuit dehors la lune scie
de longues planches dans les grands arbres abattus.
Pour des portes. Oui, pour des portes.
Camp de concentration
Makronissos, 1950

Yannis Ritsos, Journal de déportation,
traduction Pascal Neveu, Ypsilon éditeur, 2009


Une image du film Comme des lions de pierre...

Deux petits poèmes de Yannis Ritsos


Après l’Irlande, un autre pays mythique – un autre amour, une autre mer, une autre vie : la Grèce, mal en point ces temps-ci (mais elle en a vu d’autres, elle se relèvera).
Et un grand poète : Yannis Ritsos.


Le cyclamen

Petit oiseau couleur de rose, attaché par un fil
avec ses ailes enroulées volette dans le soleil,

Et si tu le regardes une fois, il te sourira
et si tu le regardes deux fois ou trois, tu te mettras à chanter.



Ne pleure pas sur la Grèce

Ne pleure pas sur la Grèce – quand elle est près de fléchir
Avec le couteau sur l’os, avec la laisse sur la nuque,

La voici qui déferle à nouveau, s’affermit et se déchaîne
pour terrasser la bête avec la lance du soleil.


Dix-huit petites chansons de la patrie amère, traduit par Anne Personnaz,
éditions Bruno Doucey, 2012


Alexandre Calder, Soleil rouge