Vania Vargas, "Mi madre tiene una cicatriz vertical"


Du Guatemala, je me souviens entre autres — aujourd’hui, c’est soirée diapo, je balance mes souvenirs de voyage — je me souviens entre autres que tout le monde m’appelait mi amor, mi vida, ce qui fait bizarre au début et puis on s’habitue ; et que les gens se levaient très tôt mais n’étaient pas pressés.
Mais j’ignorais à l’époque que le pays avait des poètes, et des bonnes.
Heureusement, Laurent Bouisset m’aide à combler mes lacunes : sur son site Fuego del Fuego, on trouve nombre de beaux poèmes guatémaltèques traduits, et ce sont de vrais bonheurs de lecture. Voici par exemple un texte écrit par Vania Vargas, qu’il propose en traduction. Mais il faut vraiment aller flâner parmi les autres aussi.



Une cicatrice verticale partage
le ventre de ma mère en deux

je lui ai faite
il y a des années
quand je suis née
en sortant par l'épaule

Sans me le dire
elle se pose la question
du nombre d'années où ma vie
continuera à lui faire mal

Je le sens à chacun de ses regards
à sa manière de me caresser les cheveux
de m'écouter pleurer parfois

Elle sait
que je persiste à chercher la sortie
par le mauvais chemin
et que les cicatrices
maintenant
je serai seule à les porter


Vania Vargas, traduite par Laurent Bouisset. 
Extrait du recueil "Quizá ese día tampoco sea hoy", Editorial Cultura, 2010 (Guatemala)

Mi madre tiene una cicatriz vertical
que le parte el vientre a la mitad

Se la hice yo
hace varios años
el día que nací
de espaldas a la salida
Sin decírmelo
ella se pregunta
cuánto tiempo más
le seguirá doliendo mi vida

Lo sé por la forma en que me mira
me acaricia el pelo
me escucha llorar

Sabe
que sigo buscando la salida
por el camino equivocado
y que ahora
las cicatrices
solo yo las voy a llevar


Gravure de Käthe Kollwitz

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