Bizarre, bizarre, bizarre. Ça fait penser aux Chants de Maldoror, à Hyeronimus Bosch, à Dostoïevski, à Beckett,
et finalement à rien de ce qu’on connaît.
Après son remarquable roman Fraudeur
– que je trouve en réalité plus réussi – il m’a paru intéressant cependant de faire
une incursion dans les poèmes d’Eugène Savitzkaya. Un petit aperçu :
Chair de poisson
Je suis un garçon tranquille, la nuit je laboure,
de boue est mon cœur pétri,
lavé de noire eau pure,
je conduis des camions, je
charge du charbon dans la
coque pourrie, je visite les
fonds, contre le mur
je salive et je crache, de
la lumière du feu
j’ai peur, comme un porteur
d’eau je titube, comme
l’éperlan, j’ai la bouche
close et les dents
desserrées, blanc du soleil
sur mes flancs et ma
queue, poudre de pierre, la
fleur de claire farine,
parmi les branches, là où le
vent souffle, là
où coule le sable, se
renverse la montagne
éphémère et pure, pleine
d’eau, glacée et tendre,
de craie fine posée sur la
mer, là je bois la
saveur, ma bouche au jet, ma
main au bec,
limon qui me parfume, (…)
Eugène
Savitzkaya, Bufo bufo bufo, Minuit, 1986
© Michael Ackerman, série "Half life" |
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