Eugène Savitzkaya écrit des poèmes et des romans, mais c’est
peut-être dans le roman qu’il est le plus poète – de même que Nicolas Bouvier par
exemple est meilleur poète dans L’Usage
du monde que dans ses poèmes.
Chaque texte qui compose l’étrange et inclassable roman Fraudeur paru l'an dernier est magnifique. Un peu au
hasard :
Avant de descendre l’escalier de la si maigre maison, le garçon franchit le palier du premier étage et
pousse la porte de la chambre de ses parents. Sa mère semble profondément
endormie, la tête blottie dans l’oreiller en duvet d’oie, un bras nu étendu sur
la couverture légère du lit matrimonial. Elle dort dans la lumière et les
mouches vrombissent. Quel âge peut avoir cette femme qui semble dormir ? Quel
chemin a-t-elle parcouru avant d’arriver ici dans ce lit en bois ? Le
livre commence ici et je n’ai pas la moindre idée du trajet qu’il prendra. Dans
mon métier, il est nécessaire de se munir d’échelles mais inutile de posséder
un mètre ruban, une montre. Un métronome est admis : le cœur, ses
secousses, ses arythmies et ses arrêts à mesurer.
Eugène Savitzkaya, Fraudeur, Minuit, 2015
Josef Koudelka, série "Gypsies" |
je vais lire ce roman :)
RépondreSupprimerC'est indispensable ! Et moi je vais lire A la cyprine, dont j'ai vu que tu as posté un extrait... (les grands esprits se rencontrent !)
SupprimerHi nnice reading your blog
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