La chambre du milieu, c’est
celle de l’enfance. Celle où le « je » se dit au centre des mère, père,
frère, grand frère mort, jeunes demi-sœurs, grands-parents, beaux-parents,
cousine, tante, oncle. Celle où on se repose, en suivant les fleurs de la
tapisserie, d’affronter toute la journée le monde immense, effrayant,
merveilleux.
« Dans la chambre d’enfant,
et plus encore d’adolescent, se nouent des pactes fondamentaux, des alliances
définitives », dit Michelle Perrot dans Histoire de chambres (Seuil, 2009). La « chambre
du milieu » d’Anne Parian a gardé intacte entre ses murs la voix des
premières années.
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Jean-Pierre ne doit pas
franchir en dormant la ligne que je trace au milieu du grand lit que nous
devons partager.
Il y a de fréquentes
occasions où nous dormons tous les deux dans la chambre du milieu.
La grande armoire à glace
au bout du lit laisse juste la place pour passer. A l’opposé de la porte la
fenêtre donne sur l’arrière du jardin.
La mère dort dans cette
chambre alors entièrement dérangée quand elle vient.
Il y a un lit à une place
de part et d’autre de la chambre des enfants à côté des W.-C. La chambre des grands-parents
est au bout du couloir à gauche.
Du lit de gauche je peux
suivre longtemps les motifs de la tapisserie à fleurs en déplaçant mes pieds sur
le mur.
L’arrière-grand-mère y
est morte.
A travers les volets un
rayon de soleil balaie le mur au passage de chaque voiture. Je suppose l’éclair
éblouissant sur les carrosseries que je compte.
Anne Parian, La chambre du milieu, P.O.L, 2011
Sally Mann, Naptime |
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