Pourquoi la littérature ?

Parce que la littérature ne se trompe jamais.

La science et la philosophie, qui se veulent une parole de vérité, sont aussi nécessairement, par contrecoup, une parole d’erreur et de mensonge. La lumière n’existe pas sans l’ombre, la vérité n’existe pas sans ses contraires. Tous les scientifiques, tous les philosophes se sont trompés – et très souvent ils ont menti, se sont mentis à eux-mêmes. La parole scientifique ou philosophique, quoique indéniablement porteuse de vérité, n’est jamais fiable.

La littérature, elle, n’a pas choisi la vérité. Elle n’a pas choisi non plus le mensonge. Les lecteurs savent bien qu’un poème est une construction qui échappe à la « vraie vie », qu’un roman ne raconte pas une « histoire vraie ». La littérature ne se veut pas une parole de vérité, elle se vit comme une parole amoureuse du langage, comme une histoire amoureuse de la vie. La littérature ne prétend pas refuser ou réfuter l’erreur ou la contradiction, elle l’absorbe et en fait un élément de son travail de transformation du langage. Elle se nourrit de l’ambiguïté, de l’insu, de l’incompris, de l’implicite. Elle se situe en dehors du dualisme insoluble de la vérité et de l’erreur et c’est pourquoi elle est salutaire et nécessaire.

La littérature ne se trompe jamais. Homère ne se trompait pas, pas plus que Toni Morrison aujourd’hui ne se trompe. Lisons-les.


Rembrandt, Philosophe en méditation

2 commentaires:

  1. Belle défense de la littérature qui, effectivement, ne se trompe jamais. C'est une boussole qui n'indique jamais la même direction. Avec elle, le nord est partout, au sud aussi bien qu'à l'est et à l'ouest.

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    1. Belle image ! Oui, il faut avoir le goût de se perdre, je pense, pour aimer la littérature.

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