Laurent Danchin : « la synergie de l’œil, de la tête et de la main »

Moi, j’aime bien les colonnes Buren du Palais-Royal. Mais c’est vrai que, comme le dit l’historien de l’art Laurent Danchin, les rayures de Buren, on se les tape depuis 40 ans (quoique : Buren semble être passé récemment aux carrés : même lui en a eu marre des rayures). Comme s’il n’y avait personne d’autre à soutenir comme artiste, en France. Comme s’il n’y avait pas d’autre forme d’art que cet art conceptuel officiel. Il y a quelque chose de pourri au royaume de l’arcontemporain, qui a choisi le (pseudo-)concept contre le faire :


« [Dans l’art contemporain,] on a remplacé le savoir-faire par du discours. C’est de la théorie. Par exemple, vous avez un livre de 900 pages illisibles pour justifier les colonnes de Buren. C’est un art qui, au fond, copie la façon de procéder des ingénieurs, ou de la publicité, c’est-à-dire qu’on pense qu’il y a d’abord une idée et qu’ensuite il y a de pauvres techniciens, très méprisés d’ailleurs – ce qui rétablit une hiérarchie – qui exécutent l’idée. (…)

La création artistique, c’est la synergie de l’œil, de la tête et de la main. Si vous dissociez le travail de la main, en disant que c’est un simple technicien qui le fait, il n’y a plus de création. C’est une perversion grave de l’art. (…) On a dissocié les différentes composantes de la création et du coup, ça n’a plus de sens. »


Laurent Danchin dans une interview vidéo, visible sur FB


© Jonathan Shimony, artiste contemporain qui peint un monde en train de s'écrouler: "ça n'a plus de sens"...

4 commentaires:

  1. Ah que ça fait du bien de lire cet avis sur l'art contemporain (une amie le nomme l'art contant pour rien!). Pour la première fois de ma déjà assez longue vie, je suis allé à Paris photo en novembre 2015. J'y ai vu des ŒUVRES, pour le mieux, au service de l'esprit, du mental mais pas grand chose au service de l'imaginaire. Mais peut-être que la période n'était pas à entendre cette phrase de Jodorowsky "un art qui ne sert pas à guérir n'est pas un art".
    Merci pour ce blog.

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    1. Et merci à vous pour ces propos. Toute résistance à la dictature de l'académisme contemporain est précieuse !

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  2. Bonjour,
    Connaissez-vous les photographies de Emmet Gowin? Photographe américain de 75 ans (vous aimez savoir l'âge)? Un magnifique livre retrace l'ensemble de son travail aux éditions Xavier Barral et dans ce livre il y a un texte sur la photographie de paysage, qui, personnellement, me donne des frissons de bonheur:
    "Dans une photographie de paysage, l'esprit comme le cœur doivent y trouver leur place. Devant le paysage, nous cherchons une invitation à y rester sans préméditation. Il s'agit toujours, en quelque sorte, de notre foyer. Parfois, nous pouvons y chercher aussi une architecture de la lumière et une poésie de l'atmosphère qui invite notre regard à pénétrer dans un paysage en pleine mutation. Il peut s'agir également de la carte - la preuve de l'objet en soi. Cela peut aussi être, dans tous les cas, la vision d'un double monde, le monde des apparences et le monde invisible à la fois.
    Même lorsqu'un paysage est profondément défiguré ou brutalisé, il brûle encore d'une vive animation intérieure. Quand nous percevons l'essence de ces lieux imposants, vastes et effroyables, un sentiment poignant peut nous envahir, notre sens de la totalité étant bouleversé par cette vision. Le cœur semble se rétracter, tandis que le corps donne toujours l'impression de rétrécir. À cet instant précis, nos sentiments tentent d'atteindre la compréhension. Telle est la vertu d'une photographie de paysage: permettre au cœur de trouvé la place qui est la sienne".
    Belle journée à vous.

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    1. Très beau texte, merci - "nos sentiments tentent d'atteindre la compréhension"... Je connais trop peu Emmet Gowin, mais vous me donnez envie d'aller y regarder de plus près !

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