Michael McCarthy, dont j’ai déjà parlé plusieurs fois dans ce blog (notamment ici),
présente A certain slant of light à la galerie Duboys à Paris.
(A noter que le titre de l’exposition est tiré d’un très beau poème de Emily Dickinson).
Les photographies de Michael McCarthy s’élaborent à la
vitesse où les plantes poussent : lentement.
Les techniques utilisées sont anciennes pour ne pas dire
archaïques. A l’heure d’Instagram, l’artiste américain a recours au sténopé, au
cyanotype, à la gomme bichromatée… Noms délicieusement barbares pour les
non-initiés, et qui fleurent bon le 19e siècle, l’artisanat un peu
maniaque, l’atelier encombré d’objets en bois, en verre, en métal – matières
dures d’où naîtra l’image, fascinante illusion de l’espace.
Ce n’est pas de la nostalgie, c’est de l’amour, et un désir
de redonner de l’enfance à la technologie moderne, que Michael McCarthy utilise
aussi par ailleurs (il ne dédaigne pas les possibilités offertes par le
numérique). Un désir de contrarier un peu le temps, d’inverser la vitesse, non
pas de faire marche arrière mais plutôt de faire un (long) détour par les
petites routes mal goudronnées, parce qu’on y sent mieux les cahots du chemin,
et de quoi celui-ci est fait. A contre-courant de la photographie contemporaine
institutionnalisée, souvent très lisse et très cérébrale, il bricole, manipule,
et surtout prend le temps de bien regarder. Il rappelle qu’un caillou peut être
grand comme une montagne – tout est question de perspective, de point de vue,
de perception.
Il y a sans doute chez lui une volonté de comprendre les
origines mêmes de la photographie. Ou de l’art. Ou de la vie. C’est à la fois
très ambitieux et très humble. Après tout, une photographie argentique, comme
une plante, c’est simplement un mariage de lumière, d’eau et de temps, avec un
peu de chimie pour lier le tout.
C’est aussi, comme une pierre, un objet patient qui s’impose
discrètement et durablement dans l’espace.
Une présence, en tout cas. Voilà ce que l’exposition de la
galerie Duboys nous donne à voir : des présences silencieuses mais
obstinées. — Silencieuses, le terme est inexact : quand on les écoute avec
l’attention qu’elles méritent, les photographies de Michael McCarthy parlent.
Mais sans faire de bruit.
© McCarthy: The landscape listens |
C'est curieux comme ce texte autour des photos de McCarthy annonce votre dernier poème paru sur le blog. Qu'importe la saison, on se focalise sur l'effet d'un rai de lumière, un silence qui n'est pas tout à fait silencieux. la présence au monde , à ses secrets et à ses lentes métamorphoses. Peu à peu, un monde intérieur se dit à mots feutrés...
RépondreSupprimerM.B. RUEL
Peu à peu, quelque chose apparaît. Quelque chose se passe.
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